Lion de la Béringie
À l’époque glaciaire, le lion de la Béringie (Panthera leo spelaea) était le félin le plus gros et le plus abondant au Yukon. Il fait partie de la famille bien connue de « lions des cavernes » originaires d’Europe et d’Asie. Les os fossilisés de lions de la Béringie sont plus petits que ceux des lions des cavernes européens, ce qui donne à penser que le lion de la Béringie pourrait être une sous-espèce distincte.
Les lions de l’époque glaciaire qui vivaient en Eurasie et en Béringie sont différents, sur le plan génétique, des lions dont les descendants peuplent aujourd’hui l’Afrique, même si leurs aires de répartition historiques se superposaient vraisemblablement dans l’ancien Proche Orient. Certains groupes de lions ont étendu leur aire de répartition bien au-delà de l’Afrique vers le milieu de l’époque glaciaire, et sont apparus en Europe et en Grande-Bretagne il y a environ 500 000 ans. On ne sait pas vraiment à quel moment les lions ont traversé la Béringie et sont apparus en Amérique du Nord. Les données génétiques donnent à penser qu’ils étaient présents en Alaska voilà environ 300 000 ans. Certains lions auraient atteint le centre des États-Unis il y a environ 150 000 ans. La population isolée au sud de l’inlandsis continental est devenue, après des milliers d’années d’évolution et d’isolement, une espèce distincte : le lion d’Amérique (Panthera leo atrox).
Les lions sont les seuls grands félins d’aujourd’hui qui, contrairement aux tigres et aux léopards (leurs parents les plus proches), vivent en groupes ou en troupes. C’est pourquoi les scientifiques croient que la vie en groupe est apparue tôt dans l’évolution du lion, au tout début de l’époque glaciaire, il y a plus de deux millions d’années. Mais les preuves que le lion de la Béringie et les autres espèces de lions de l’époque glaciaire vivaient effectivement en troupes restent à découvrir.
Premiers témoins visuels
Une autre énigme non résolue relative aux lions de l’époque glaciaire concerne leur apparence physique. Dans les peintures rupestres de la grotte de Chauvet (en France) et d’ailleurs en Europe, le lion est invariablement représenté sans crinière. Ces peintures sont considérées comme des témoignages très justes de l’apparence et du comportement des lions de l’époque. Sur une fresque, un lion mâle sans crinière se tient à côté d’une femelle, dans une posture associée à la reproduction. C’est, à ce jour, la preuve la plus convaincante que les lions de l’époque glaciaire étaient dépourvus de crinière.
Contrairement à ces lions de l’époque glaciaire, les lions qui ont plus tard occupé le sud de l’Europe étaient représentés avec des crinières, ce qui donne à penser qu’il s’agit de lions d’Afrique qui se seraient répandus vers le nord après l’époque glaciaire. Pour les lions d’aujourd’hui, la crinière joue un rôle important dans la sélection sexuelle : dans bien des populations, les mâles à la crinière la plus imposante et la plus foncée sont les reproducteurs les plus recherchés. Cette caractéristique serait possiblement reliée à la vie en groupe.
La crinière joue également un rôle important contre la déperdition de chaleur : plus elle est longue et fournie, meilleure est l’isolation. Difficile, donc, d’imaginer comment le lion de la Béringie aurait pu affronter le froid glaciaire sans crinière. Toutefois, certains posent l’hypothèse que tout le corps (et non seulement la tête et le cou) des lions de l’époque glaciaire était recouvert d’une fourrure dense. Si c’était le cas, le besoin biologique de l’animal en matière d’isolation étant comblé, il est peu probable qu’une crinière soit apparue chez le lion de la Béringie de l’époque glaciaire.
Le saviez-vous?
On trouve, sur les flancs d’une carcasse momifiée de bison des steppes découverte près de Fairbanks, en Alaska, des traces de larges coups de griffes faites par un prédateur. Le seul animal de l’époque glaciaire capable de produire ces marques est le lion de Béringie.
On peut voir cette carcasse de bison, surnommée « Blue Babe », au Museum of the North, à Fairbanks.
En outre, le fait que la crinière des lions d’aujourd’hui constitue un avantage sélectif porte à croire que les premiers lions en étaient dépourvus. Par ailleurs, comme il est pratiquement certain que les lions d’Afrique avaient une crinière, il est possible que deux types de lions aient coexisté en Europe centrale au cours de l’époque glaciaire : le lion à crinière et le lion sans crinière.
Pour en apprendre encore plus sur le lion d'Amérique, consultez le dossier de recherche sur la Béringie (en anglais).